Suivi des marchés de la semaine
Découvrez et téléchargez l'intégralité de notre suivi des marchés de la semaine du 9 août.
Evergrande, un risque pour le marché chinois ?
Il y a seulement trois ans, c'était la plus grande société immobilière au monde, aujourd’hui c’est un risque pour le système financier chinois. En 12 mois à peine, le cours de l'action de la société s'est effondré de plus de 70 % et ses obligations sont tombées en dessous de 50 cents par dollar. S&P a abaissé la cote de crédit d'Evergrande de deux crans et les actions ont chuté de 13% après que la société ait décidé de ne pas verser de dividende spécial. Le titre souffre aussi de l'inquiétude suscitée par la répression croissante de Pékin envers un certain nombre d’industries, répression qui, après s’être concentrée sur le secteur immobilier, puis les géants technologiques tels qu’Alibaba et Tencent se poursuit dans le secteur de l’éducation, prenant par surprise les investisseurs.
Le devenir d’Evergrande semble très problématique, d’autant plus que la confiance dans l'entreprise s'est effondrée. Le temps presse. En mars prochain, dans seulement huit mois, $2 milliards d'obligations d'Evergrande arriveront à échéance, suivis de $1,45 milliard le mois suivant. Alors qu'Evergrande a remboursé toutes ses obligations cette année, le refinancement en 2022 serait difficile si l'accès du promoteur aux marchés des capitaux ne se rétablissait pas à temps.
Trois banques avec une exposition combinée à Evergrande de $7,1 milliards ont récemment décidé de ne pas renouveler certains prêts cette année. Les principaux créanciers locaux prévoient de se réunir bientôt pour discuter de ce qu'il faut faire de leurs prêts Evergrande et attendent les directives des autorités chinoises. De plus, la semaine dernière, au moins quatre grandes banques de Hong Kong ont cessé d'accorder des prêts hypothécaires à deux complexes d'appartements Evergrande dans l'ancienne colonie britannique, craignant qu'Evergrande ne se retrouve à cours de liquidités pour terminer la construction. Sous la pression de l'Autorité monétaire de Hong Kong, ces banques ont depuis fait marche arrière.
Avec $300 milliards de passifs et des liens avec une myriade de banques, la faillite de ce promoteur (le plus endetté au monde) enverrait des ondes de choc à travers le système financier chinois. Les secousses qui s’en suivraient seraient également ressenties par plusieurs millions de propriétaires chinois. Pour atténuer la crise, la société a vendu des participations dans diverses entreprises et, selon toute vraisemblance, aura besoin d’en vendre encore plus. La société détient environ $80 milliards de capitaux dans des activités non immobilières. Evergrande a déjà levé près de $8 milliards cette année, en vendant des participations dans son unité de véhicules électriques, son activité Internet, une société immobilière de Hangzhou et la plate-forme en ligne FCB Group. Espérons que ces actifs à vendre ne subiront pas eux aussi la défiance des possibles investisseurs et que Evergrande trouvera preneur à des prix satisfaisants pour éponger ses dettes. En fin de compte, le sort d'Evergrande appartiendra à Pékin. Le gouvernement du Guangdong, où la société est implantée, a tenu une réunion avec le promoteur pour discuter de la manière de résoudre ses problèmes de dette début juillet, rien n'a filtré.
Rédigé par
Lucile LOQUÈS
Directrice du pôle Actions Internationales
Le 09 août 2021