Environnement économique - juin 2023
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Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de juin 2023 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie.
Nos perspectives économiques et financières
Sortir d’un régime monétaire extraordinaire n’est pas sans douleur. Mais l’inflation, qui a atteint des niveaux élevés, a conduit à un retournement violent de la politique monétaire. Ce retournement n’est pas sans conséquence pour les acteurs publics et privés. Alors que des faillites bancaires se sont produites aux Etats-Unis, les banques centrales se trouvent face à un dilemme : combattre une inflation durable, conformément à leur premier objectif, au risque de faire naître une instabilité financière. Par ailleurs, revenir en arrière sur les politiques exceptionnelles d’achat d’actifs va se trouver en contradiction avec les besoins de financement grandissants des Etats. Les banques centrales semblent vouloir rester fermes dans leur volonté de monter leurs taux directeurs et de traiter les sujets d’instabilité financière par le biais d’instruments dédiés, mais potentiellement insuffisants pour restaurer durablement une confiance défaillante.
Les banques centrales réaffirment la priorité à l’inflation
Les banques centrales semblent choisir de privilégier la lutte contre des tensions inflationnistes encore conséquentes à la montée des risques sur l’activité économique et la stabilité financière. Elles déclarent vouloir augmenter encore leurs taux directeurs et tentent de persuader qu’ils resteront élevés longtemps. Aux Etats-Unis, le Congrès a mis fin au suspense en votant la suspension du plafond de la dette. En Chine, le ralentissement de l’activité est confirmé, amenant les autorités envisager un nouveau plan de soutien. Sur le marché des changes, l’euro s’est apprécié de 1,7% sur le mois, à 1,0866 contre le dollar. Le prix du baril de Brent a progressé de 3,1% par rapport au mois précédent, à 74,90$.
Aux États-Unis, les indicateurs d’activité restent mitigés. Les résultats des enquêtes auprès des entreprises continuent à se dégrader et les statistiques du secteur industriel montrent désormais un net ralentissement de l’activité. Mais la consommation des ménages reste en hausse et le marché du logement s’est redressé en mai, soutenant l’activité dans le secteur de la construction. Alors que l’inflation a continué à diminuer, la Réserve fédérale a laissé la fourchette cible de son taux directeur inchangée, à [5,00 ; 5,25%]. Mais le discours d’accompagnement ne laisse que peu de doute sur la poursuite de la hausse ces prochains mois. Toutefois, la possibilité de nouvelles hausses de taux n’est pas écartée alors que certains banquiers centraux continuent de mettre l’accent sur la résistance de la croissance et un marché du travail tendu : 339 000 créations d’emplois en mai, taux de chômage toujours proche de ses plus bas et nouvelle augmentation du nombre de postes non-pourvus en avril.
Au Royaume-Uni, l’inflation reste au cœur des préoccupations. Elle est restée inchangée, à 8,7% sur un an en mai et l’inflation sous-jacente a augmenté, pour atteindre un plus haut depuis mars 1992, à 7,1%. Elle reste entretenue par la progression rapide des salaires (croissance annuelle moyenne de 7,2%, hors bonus, entre février et avril), dont la hausse est imputable, en partie, à la forte augmentation du salaire minimum (+9,7% en avril). Dans ce contexte, et alors que l’activité économique fait preuve de résistance, la Banque d’Angleterre a remonté son taux directeur de 50 points de base en juin, à 5,00%. De plus, le communiqué de la banque centrale laisse la porte ouverte à la poursuite du mouvement de durcissement de sa politique monétaire ces prochains mois.
En zone euro, le cycle de hausses des taux directeurs n’est pas terminé. La majorité des membres du Conseil des gouverneurs de la BCE plaide pour encore un relèvement en juillet, au moins. Ils insistent aussi beaucoup sur la nécessité de maintenir les taux directeurs pendant une période prolongée au niveau qui aura été atteint lorsqu’ils auront décidé que la hausse est suffisante. De fait, si l’indice des prix à la consommation continue à ralentir (+5,5% sur un an en juin), l’inflation sous-jacente a à nouveau augmenté, à 5,4%. De plus le marché du travail demeure historiquement tendu, malgré une activité en berne : le PIB de la zone euro s’est en effet contracté (de 0,1%) au dernier trimestre 2022 et au début de cette année et les indicateurs mensuels les plus récents -résultats d’enquêtes ou statistiques d’activité- ne permettent pas d’anticiper un rebond significatif dans l’immédiat.
En Chine, bien qu’officiellement confiant dans la réalisation de son objectif de croissance, le gouvernement se préoccupe du ralentissement de l’activité au deuxième trimestre. L’amélioration post-Covid de la conjoncture économique était essentiellement tirée par le redressement de la consommation des ménages, mais des signes de ralentissement ont commencé à apparaître. Le moindre dynamisme de l’activité se traduit aussi par un ralentissement des flux de financement aux entreprises et aux ménages. Les autorités ont déjà baissé plusieurs des taux d’intérêt contrôlés par la banque centrale et envisageraient la mise en œuvre d’un nouveau plan de soutien à l’économie. Au Japon, l’activité économique poursuit son redressement progressif vers son niveau prépandémie. Toutefois, les prix continuent à augmenter plus vite que les salaires ce qui devrait affecter la reprise de la consommation. La Banque du Japon -qui considère toujours que l’inflation devrait rapidement repasser sous la cible des 2%- a encore maintenu sa politique monétaire inchangée.
Sources des données: Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Jean-Louis MOURIER
Analyste économique
le 3 juillet 2023