"Le regard du gérant" : Notre analyse des discussions entre la Chine, le Japon et la Corée du Sud sur la mise en place d’accords de SWAP

Le Point de vue de l'expert

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Alors que les annonces d’accords commerciaux entre les États-Unis et deux de ses principaux partenaires commerciaux (Japon et Corée du Sud) ont reçu une large couverture médiatique, en arrière-plan, la Japon et la Corée du Sud signaient des accords avec la Chine pour réduire leur dépendance au dollar en cas de survenance d’une crise financière.

Au cours des dernières semaines, le Japon et les États-Unis ont officialisé un accord commercial portant sur 550 mds$ d’investissements et d’achats de biens américains, tandis que la Corée vient de faire de même pour un montant proche de 350 mds$ (comprenant notamment d’importants investissements dans les chantiers navals américains). Toutefois, malgré les menaces américaines du printemps, le sujet des devises et des réserves en dollar n’a pas été remis à l’ordre du jour de ces dernières négociations. Néanmoins, nous notons que les autorités américaines ont refusé d’accorder une ligne de swap spéciale en dollars à la Banque de Corée dans le cadre de ces accords commerciaux. Cette possibilité aurait permis d’éviter la baisse des réserves en dollars, rendue obligatoire par les investissements directs des sociétés coréennes sur le sol américain.

La diversification des outils de réponse en cas de crise de liquidité est donc une préoccupation importante pour les autorités japonaises et coréennes, qui cherchent à réduire leur dépendance extrême au dollar américain. De son côté, Pékin y voit une opportunité et multiplie les accords de swap en yuans (d’ores et déjà au nombre de 32 dans le monde). En 2023, la Chine et la Corée ont renouvelé un accord de swap offrant à cette dernière un accès à la liquidité en cas de crise, tandis que la Chine y voit un levier d’internationalisation de sa monnaie. Lors du sommet de Coopération Economique de l’Asie Pacifique de cette semaine, des discussions ont été menées pour augmenter le plafond, aujourd’hui fixé à 400 mds de Yuan. Dans ce même ordre d’idée, la Chine étudie également un élargissement des accords trilatéraux d'échange de devises avec le Japon et la Corée du Sud dans le cadre du Chiang Mai Initiative (CMI), esquissant les contours d’un bloc monétaire asiatique.

Ainsi, alors que la rivalité entre la Chine et les États-Unis dessine une reconfiguration régionale des échanges commerciaux, nous constatons que les pays sont très actifs dans leur volonté de se préparer à un changement de paradigme monétaire, et par conséquent aux chocs que ce dernier pourrait induire.

Rédigé par

Kenn GAGNON
Responsable d'équipe Gestion Actions Asie