Environnement économique Septembre 2020
Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique de septembre 2020 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Nos perspectives économiques et financières
Le choc récessif lié à la crise sanitaire vient s’appliquer sur des fragilités majeures, pré-identifiées dans nos Perspectives Economiques et Financières : dettes des agents publics et privés, structures des revenus et inégalités, remise en cause de la mondialisation fondée sur le multilatéralisme et chocs politiques et géopolitiques. Les circuits classiques de sortie de crise pourraient s’avérer rapidement inopérants car les bases sont déjà malsaines. Dans ce contexte, nous tablons sur une dépression économique sévère qui devrait amplifier les fragilités observées suite à la crise financière de 2008.
Les données publiées au cours du mois de septembre confirment un essoufflement de l’activité. Les effets du rattrapage lié à la levée des mesures sanitaires se sont affaiblis et la résurgence de l’épidémie de covid-19, particulièrement prononcée en Europe, menace la fragile reprise de ces derniers mois et appelle à une grande prudence sur l’orientation de l’activité. Aux Etats-Unis, les négociations pour un nouveau plan de soutien budgétaire sont restées dans l’impasse à l’approche des élections du 3 novembre. En Europe, le pessimisme prévaut également concernant les négociations du Brexit. Sur le marché des changes, après quatre mois consécutifs de hausse, l’Euro s’est déprécié de 1,9% face au dollar à 1,171 dollar pour un euro. La dynamique du pétrole Brent s’est également inversée, avec une baisse sur le mois de 9,6% qui fait chuter le prix du baril à 40,1 dollar.
Aux Etats-Unis, les indicateurs suggèrent une évolution plus contrastée de l’activité en cette période de rentrée. Du côté des ménages, le rattrapage des dépenses, robuste en mai et juin, est désormais nettement plus mesuré. Les ventes au détail en août n’ont progressé que de 0,6% en glissement mensuel, après 0,9% en juillet. Le tassement de la vigueur de l’activité est également visible dans l’industrie, où la production a affiché des gains modestes en août (+0,4%). Une dynamique nettement insuffisante pour corriger le coup porté au secteur : la production industrielle s’inscrit encore en contraction de près de 8% en rythme annuel. Sur le plan sanitaire, après deux mois d’amélioration le nombre de cas journaliers de covid-19 connait une inflexion haussière depuis la mi-septembre, faisant peser le risque d’une deuxième vague de contamination et prolongeant les incertitudes. Dans ces conditions, le marché du travail affiche des gains plus modestes et reste très dégradé. Malgré 1,4 million d’emplois créés en août, les destructions de postes de mars et avril n’ont été à ce jour couvertes qu’à hauteur de 50%. Le nombre de nouvelles demandes d’allocation chômage a cessé de refluer en septembre, se maintenant à des niveaux élevés (environ 850 000 par semaine) et suggérant des progrès désormais limités. Concernant la politique monétaire, la Réserve fédérale américaine a modifié les indications prospectives sur son taux directeur (forward guidance) lors de sa réunion de septembre. Cette évolution correspond à la mise en œuvre de la nouvelle stratégie de ciblage d’inflation moyenne, annoncée fin août, qui rend la politique monétaire plus tolérante vis à vis d’une hausse de l’inflation. Sur le plan budgétaire, les négociations entre Républicains et Démocrates pour un nouveau plan de soutien budgétaire sont restées dans l’impasse. Les chances de conclusion d’un accord avant les élections du 3 novembre s’amenuisent, renforçant les risques pesant sur l’activité pour la fin d’année. A un mois du scrutin présidentiel, le candidat Démocrate Joe Biden maintient son avance dans les intentions de votes.
La Zone euro est confrontée à une forte résurgence de l’épidémie de covid-19. Si le nombre de décès reste, pour l’heure, plus faible que lors de la première vague, de nouvelles mesures de distanciation localisées ont été mises en place par les gouvernements. Le renforcement de ces mesures pourrait largement affecter les perspectives d’activité des prochains mois, d’ores et déjà affaiblies. Les indices de climat des affaires des directeurs d’achat (PMI) confirment en effet l’essoufflement du rebond en septembre. L’estimation préliminaire du PMI composite dans la Zone euro se replie à 50,1, ce qui indique une quasi-stagnation de l’activité sur le mois (le seuil de 50 sépare contraction et croissance). Le PMI services enregistre un fort recul et retourne en zone de contraction à 47,6, du fait d’une demande toujours au plus bas. Au niveau des pays, l’Allemagne resterait le principal moteur de la croissance européenne avec un PMI composite toujours en nette expansion à 53,7 grâce au dynamisme de son industrie et malgré un recul des services. En revanche, l’activité en France serait désormais en contraction avec un PMI composite à 48,5 en septembre en lien avec un recul des services qui a largement dominé la légère amélioration industrielle. Sur le plan budgétaire, le gouvernement français a dévoilé les contours de son plan de relance, d’un montant de 100 Mds€ (environ 4,1% du PIB) réparti entre 2020 et 2021. En termes de politique monétaire, la BCE n’a pas modifié le rythme de l’assouplissement lors de sa réunion de septembre, tout en véhiculant un message très prudent et continuant d’alerter sur le poids des incertitudes.
Concernant les négociations du Brexit, les perspectives d’un accord sur la relation future se sont fortement détériorées au cours du mois, suite à la publication par le gouvernement britannique d’un projet de loi impliquant le non-respect de l’accord de retrait signé en janvier dernier avec l’UE.
En Chine, les publications du niveau de l’activité industrielle et des ventes au détail pour le mois d’août confirment une économie chinoise à deux vitesses, l’industrie, soutenue par les exportations, ayant retrouvé des rythmes de croissance comparables à ceux observés avant la crise sanitaire, tandis que la consommation stagne nettement sur les derniers mois.
Au Japon, la situation économique reste dégradée, comme l’illustre l’indicateur PMI composite en septembre (45,2 points) et la faiblesse des commandes à l’industrie. Sur le plan politique, sans surprise, Yoshihide Suga a été élu à la tête du Parti libéral-démocrate (PLD) et a succédé à Shinzo Abe, démissionnaire pour raison de santé, au poste de Premier Ministre. Yoshihide Suga, ancien porte-parole du gouvernement, devrait s’inscrire dans la continuité de son prédécesseur.
Sources des données : Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, Markit, Statistics Bureau of Japon, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Sébastien Berthelot
Responsable adjoint de l'analyse économique
Le 2 octobre 2020