Environnement économique - mars 2023

Environnement économique

Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de mars 2023 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie.

Nos perspectives économiques et financières

La modération temporaire des prix de l’énergie n’empêchera pas un équilibre plus inflationniste sur le long terme. La pandémie puis la guerre en Ukraine ont conduit les Etats à une recherche de souveraineté intrinsèquement inflationniste, tandis que les effets désinflationnistes de la mondialisation, s’amenuisent. Par ailleurs, le durcissement des relations internationales entre les grandes puissances semble confirmer l’atteinte de la limite du multilatéralisme économique et diplomatique tel qu’il existe. Ces changements en cours se superposent à un impératif de décarbonation de l’économie qui, à demande constante, est également vecteur de pression haussière sur les prix. Dans ce contexte, les banques centrales se retrouvent face à un dilemme entre la lutte sans compromis contre l’inflation ou la préservation de la stabilité financière, mise en péril par la remontée rapide des taux. 

Les banques centrales naviguent entre lutte contre l’inflation et stabilité financière

Le mois de mars a été marqué par les difficultés du secteur bancaire, notamment aux Etats-Unis et en Suisse, qui ont conduit les autorités monétaires à intervenir pour assurer la stabilité du système financier. Les principales banques centrales occidentales n’ont pas relâché pour autant la lutte contre l’inflation et ont maintenu leur resserrement monétaire. En parallèle, la fragmentation du paysage géopolitique se poursuit. Alors que Pékin et Moscou affichent leur rapprochement, le Président chinois s’étant rendu en Russie pour la première fois depuis la guerre en Ukraine, le Japon et les Etats-Unis ont convenu d’un accord commercial sur les matières premières critiques. Dans le même temps, le Royaume-Uni a conclu son plus grand accord commercial depuis le Brexit en rejoignant le Partenariat de libre-échange transpacifique. Sur le marché des changes, l’euro s’est apprécié de 2,4% sur le mois et atteint 1,0875 contre le dollar. Le prix du baril de Brent a baissé de 4,91% sur le mois, à 79,77$.

 

AmériqueAux Etats-Unis, à la suite des faillites de Silicon Valley Bank et de Signature Bank, la Réserve fédérale a annoncé la mise à disposition de liquidités supplémentaires via un nouveau programme intitulé « Bank Term Funding Program » (BTFP). Ce programme propose des prêts jusqu’à un an, en échange de l’apport en collatéral de certains actifs tels que les titres du Trésor américain. Le collatéral est considéré à sa valeur faciale et non à sa valeur de marché, ce qui permet aux banques détenant des titres dont la valeur de marché a chuté à la suite de la remontée des taux, d’obtenir des liquidités sans vendre ces actifs à un prix décoté. En dépit des perturbations sur le secteur bancaire, la Fed a relevé de 25 points de base la fourchette cible des taux directeurs, la portant à [4,75% ; 5%]. Les prévisions individuelles des membres du Comité de politique monétaire (FOMC) n’ont pas évolué depuis la réunion de décembre et indiquent que le taux directeur pourrait être porté à [5% ; 5,25%] d’ici à la fin d’année. Dans le même temps, les pressions inflationnistes se sont quelque peu modérées en février. L’indice des prix à la consommation a en effet enregistré une croissance annuelle à 6,0%, après 6,4% le mois précédent. L’inflation sous-jacente (hors alimentation et énergie) a également fléchi, mais à un rythme plus lent (5,5% après 5,6% en janvier). Sur le marché du travail, la forte demande de main d’œuvre persiste, comme en témoigne la dynamique des créations de postes (+311 000 en février) et la croissance des salaires qui reste élevée à 4,6%. Concernant l’activité industrielle, les données publiées sur le mois font part d’un affaiblissement de la production industrielle (-0,2% en glissement annuel en février) tandis que les perspectives demeurent mal orientées comme le montrent les indicateurs d’enquête publiés sur le mois.

 

Europe

Au Royaume-Uni, l’inflation est repartie à la hausse en février. La croissance des prix à la consommation a atteint 10,4%, après 10,1% en janvier, tandis que l’inflation sous-jacente est également en hausse à 6,2% (contre 5,8% le mois précédent). Dans ce contexte, la Banque d’Angleterre a relevé son taux directeur de 25 points de base, le portant à 4,25%. Par ailleurs, le ministre des Finances a présenté son budget de printemps, qui illustre la volonté du gouvernement de Rishi Sunak de soutenir la croissance. Parmi les principales mesures, on note une réforme ambitieuse du système de garde d’enfants visant à améliorer le taux d’emploi, qui demeure toujours en deçà des niveaux prépandémiques.

En Zone euro, la Banque centrale européenne (BCE) continue à privilégier la lutte contre l’inflation. Elle a ainsi augmenté ses taux directeurs de 50 points de base lors de sa réunion de mars, portant le taux de dépôt à 3%. Concernant les perturbations sur le secteur bancaire aux Etats-Unis et en Suisse, la banque centrale s’est voulue rassurante quant aux risques de contagion et a tenu à rappeler qu’elle dispose des outils nécessaires pour intervenir si besoin était. En parallèle, les effets du resserrement monétaire entamé depuis plusieurs mois s’observent dans les données de crédit du mois de février. En effet, la croissance annuelle du crédit poursuit son recul et atteint 3,2% pour les prêts aux ménages et 5,7% pour les prêts aux entreprises non-financières, en baisse par rapport aux taux de croissance de 3,6% et 6,1% respectivement enregistrés en janvier. Du côté des prix, l’inflation en zone euro poursuit sa baisse, à 6,9% en mars après 8,5% le mois précédent, en raison du recul des prix de l’énergie. En revanche, l’inflation sous-jacente continue d’augmenter et atteint un point haut à 5,7%. Sur le marché du travail, la persistance des tensions se confirme. Le taux d’emplois vacants est en effet resté stable au quatrième trimestre 2022 à 3,1%, tandis que les salaires accélèrent nettement à 5,1% en glissement annuel, ce qui avive le risque de boucle prix-salaire. Par ailleurs, l’activité économique demeure résiliente selon les indicateurs d’enquête PMI du mois de mars, dont l’indice composite s’établit une nouvelle fois au-dessus du seuil de 50 à 54. L’activité demeure bien orientée dans les services, avec un PMI à 55,6 tandis que l’activité du secteur manufacturier se maintient en zone de contraction à 47,1. Du côté de l’Union européenne, le Parlement européen et le Conseil sont parvenus à trouver un accord pour accélérer l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le bouquet énergétique, qui devra atteindre 42,5% d’ici 2030.

 

Asie Océanie

En Chine, la session annuelle de l’Assemblée nationale populaire (ANP) a renforcé le pouvoir de Xi Jinping. Outre la réélection attendue du Président chinois pour un troisième mandat de cinq ans, l’ANP a été l’occasion de la nomination d’un de ses proches, Li Qiang, au poste de Premier ministre. Après un objectif de croissance économique à 5,5% en 2022, qui n’avait pas été atteint en raison de la politique zéro-covid, le gouvernement chinois vise une croissance de 5% cette année, l’objectif le plus faible depuis plus de 25 ans. Les données économiques publiées durant le mois de mars indiquent un rebond solide de l’activité en début d’année 2023, tant du côté de la consommation que du côté de la production ou de l’investissement, qui ont profité de la levée des restrictions sanitaires ainsi que du soutien des autorités. Au Japon, la Banque du Japon a une nouvelle fois maintenu ses taux inchangés. Dans le même temps, l’inflation s’est modérée grâce aux subventions sur les prix de l’énergie (3,3% en février contre 4,4% en janvier), mais la dynamique de l’inflation sous-jacente se maintient. Du côté de l’activité, l’industrie a montré quelques signes de redressement en février, tandis que la vigueur de la consommation se poursuit.

 

Sources des données: Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, S&P Global, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.

 

Eloïse GIRARD-DESBOIS
Analyste économique

Le 3 avril 2023