Environnement économique Juin 2020
Retrouvez notre restrospective de l'environnement économique de juin 2020 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Nos perspectives économiques et financières
Le choc récessif lié à la crise sanitaire vient s’appliquer sur des fragilités majeures, pré-identifiées dans nos Perspectives Economiques et Financières : dettes des agents publics et privés, structures des revenus et inégalités, remise en cause de la mondialisation fondée sur le multilatéralisme et chocs politiques et géopolitiques. Les circuits classiques de sortie de crise pourraient s’avérer rapidement inopérants car les bases sont déjà malsaines. Dans ce contexte, nous tablons sur une dépression économique sévère qui devrait amplifier les fragilités observées suite à la crise financière de 2008.
Alors que la diffusion du covid-19 semble maintenant globalement sous contrôle en Europe, la situation sanitaire s’est nettement dégradée au niveau mondial au cours du mois de juin. Cette propagation, notamment sur le territoire américain, nourrit les incertitudes sur la trajectoire de l’économie mondiale et renforce le risque de dépression économique. C’est dans ce contexte que le FMI a significativement révisé ses projections de croissance à la baisse et anticipe désormais une contraction de 4,9% du PIB mondial en 2020 (contre -3% en avril dernier). Le repli est particulièrement marqué au sein des pays développés et notamment en Zone euro où une baisse de l’activité de 10,2% est anticipée. Aux Etats-Unis, le recul atteindrait près de 8,0%. Sur le marché des changes, l’Euro s’est apprécié de 0,6% et termine le mois à 1,12 dollar pour un euro. Le prix du baril de pétrole Brent atteint 41$, soit une progression mensuelle de 16%.
Aux Etats-Unis, le redressement des indicateurs d’activité suite à la levée progressive des mesures de distanciation est très partiel et témoigne d’un impact économique durable de la crise sanitaire. La production industrielle a faiblement progressé en mai, permettant seulement une stabilisation de la contraction annuelle à un niveau extrêmement dégradé de -15%. Du côté des ménages, les dépenses ont rebondi en mai, mais la contraction annuelle reste forte (-10%). Les achats de services sont toujours très faibles (-14% en rythme annuel) avec des situations restant particulièrement dégradées dans les loisirs (-56%) et la restauration-hôtellerie (-41%). Le rapport d’emploi du mois de mai fait état d’une reprise des embauches sur le marché du travail (+2,5 millions) après la chute historique d’avril (-20,5 millions), et d’une baisse du taux de chômage. Néanmoins, le Bureau des Statistiques du Travail précise que cette estimation du chômage est très vraisemblablement sous-évaluée en raison des difficultés à prendre en compte les personnes absentes du travail. Par ailleurs, les demandes hebdomadaires d’allocation chômage suggèrent un ralentissement des réembauches courant juin, après une phase de rattrapage en mai. Sur le plan sanitaire, le pays fait face à une nouvelle poussée de l’épidémie, touchant particulièrement les Etats du sud et de l’ouest, jusqu’alors relativement épargnés. Les autorités locales ont ainsi réinstauré des mesures de distanciation sur la fin du mois, ce qui participera à un prolongement et à une aggravation du choc récessif. Dans ce contexte, des discussions envisageant un nouveau plan de soutien budgétaire sont en cours au Congrès.
En zone euro, les membres du Conseil Européen ne sont parvenus à aucun accord sur la mise en place du plan de relance et du cadre budgétaire 2021-2027. Les dissensions restent importantes quant à la forme et au montant de ce soutien budgétaire qui interviendrait à l’échelle européenne. Un nouveau sommet se tiendra à la mi-juillet pour tenter une avancée. La Banque Centrale Européenne (BCE) a intensifié son soutien monétaire en début de mois, en annonçant une augmentation de la taille du programme d’achats d’actifs PEPP (Pandemic Emergency Purchase Programme) de 600 Mds€, portant ainsi le total à 1350 Mds€. La durée de ce programme a par ailleurs été allongée de six mois jusqu’à juin 2021 (contre fin 2020 précédemment). Concernant la décision de la Cour Constitutionnelle allemande, qui considère que la BCE agit en dehors de son mandat, Christine Lagarde a déclaré que la BCE était sous la juridiction de la Cour de Justice de l’Union Européenne, qui a déjà jugé que le programme d’achats de titres du secteur public (PSPP) était bien dans le mandat de la BCE. Elle a également rappelé la primauté du droit européen. En termes d’activité, les données d’avril témoignent du choc sans précédent subi par l’économie européenne, tant en termes de production industrielle, d’activité dans la construction ou dans les services. Les premiers indicateurs d’activité concernant le mois de mai, à l’image des immatriculations, et les indicateurs de climat des affaires (PMI, IFO, Commission Européenne) pour le mois de juin, suggèrent une amélioration relative de la situation économique sur fond de levée des mesures sanitaires, mais les niveaux restent toutefois très dégradés par rapport à la situation pré-crise.
En Chine, les indices de confiance des directeurs d’achats calculés par l’office statistique chinois ont poursuivi leur rebond en juin, indiquant une reprise progressive de l’activité dans les services et dans le secteur manufacturier relativement au mois précédent. Les données d’investissement et consommation restent néanmoins en berne. Par ailleurs, les craintes d’une nouvelle vague de contamination se sont accentuées à Pékin, où le nombre de cas positifs au Covid-19 recensés a significativement augmenté courant juin, poussant les autorités à réinstaurer des mesures de confinement localement. Sur le plan politique, le parlement chinois a adopté la législation sur la sécurité nationale sur Hong Kong, un mouvement risquant d’éroder un peu plus le statut d’autonomie renforcée dont jouissait la péninsule relativement au pouvoir central de Pékin.
Au Japon, les échanges commerciaux ont poursuivi leur dégradation sur le mois de mai, avec des reculs marqués à la fois des exportations et des importations. La dégradation des flux d’exportations est particulièrement spectaculaire vers l’Europe et les Etats-Unis. Sur le front de l’inflation, la dynamique des prix à la consommation continue de s’affaiblir avec une inflation nulle au cours du mois de mai.
Rédigé par
Sébastien Berthelot
Responsable adjoint de l'analyse économique
Le 3 juillet 2020