Environnement économique - Juillet 2022
Temps de lecture : min
Retrouvez notre rétrospective de l'environnement économique du mois de juillet 2022 des zones Amérique, Europe et Asie-Océanie
Les Banques centrales font de la lutte contre l’inflation leur priorité
Nos perspectives économiques et financières
L’économie mondiale est confrontée à des tensions internationales aiguës qui attisent les pressions inflationnistes. Les origines de l’accélération des prix sont multiples et un régime d’inflation durablement plus élevée est en passe de s’installer. La normalisation des politiques monétaires des grandes banques centrales a été trop tardive et le durcissement du resserrement monétaire va affecter la dynamique d’activité. Ce mouvement de hausse de taux est un défi à l’heure où les besoins budgétaires des Etats demeurent importants pour lutter contre les effets récessifs de la pandémie et de la guerre. Par ailleurs, la géopolitique des matières premières et les positionnements affichés des Etats sur le conflit Russo-Ukrainien, soulignent la complexité des questions d’approvisionnement et de dépendance en matières essentielles, une problématique qui pénalisera particulièrement l’économie européenne.
Les pressions inflationnistes se sont intensifiées sur le mois aux Etats-Unis et en Europe, menant les Banques centrales à procéder à un nouveau resserrement de leur politique monétaire. L’affaiblissement des économies américaine et chinoise s’est confirmé au 2ème trimestre, avec un recul particulièrement marqué en Chine, où la politique sanitaire stricte a fortement pesée sur l’activité. Par ailleurs, les pays européens font face à des risques de crise énergétique cet hiver en cas de pénurie de gaz, les obligeant à envisager des réductions de consommation dès maintenant. Sur le marché des changes, l’euro s’est déprécié de 1,82% et termine le mois à 1,020 dollar pour un euro. Le prix du baril de Brent a diminué de 4,2% sur le mois, pour atteindre 110$.
Aux États-Unis, le PIB du 2ème trimestre (T2) enregistre un 2ème repli consécutif, en déclin de -0,2% en glissement trimestriel, après une baisse de -0,4% au T1. La modération de l’activité est avant tout due à la faible dynamique des stocks ainsi qu’un déclin de l’investissement résidentiel (-3,7% par rapport au trimestre précédent). La consommation des ménages progresse légèrement (+0,3%), mais reflète une forte hétérogénéité entre la consommation de biens, qui fléchit sur le trimestre, et des dépenses en services qui enregistrent une dynamique favorable. Dans le même temps, les pressions inflationnistes se sont intensifiées au mois de juin, l’inflation ayant atteint 9,1% après 8,6% en mai, tandis que les tensions sur le marché du travail s’accentuent. Avec 372 000 emplois créés au mois de juin, le marché du travail est proche de son niveau prépandémique, même si 524 000 emplois sont toujours manquants par rapport au mois de février 2020. Les pressions salariales demeurent également soutenues au 2ème trimestre, la croissance de l’indice du coût de l’emploi (ECI) ayant atteint 5,1% en glissement annuel (GA). Cela devrait conforter la Réserve Fédérale dans sa trajectoire de resserrement monétaire, après une hausse de 75 points de base (pb) supplémentaire décidée lors de sa réunion de juillet.
Au Royaume-Uni, le mois a été marqué par la démission de Boris Johnson au poste de Premier Ministre. Il occupera toutefois ses fonctions jusqu’à ce que le Parti conservateur nomme un nouveau dirigeant du parti, qui prendra la place de B. Johnson à la tête du gouvernement. Du côté économique, l’inflation poursuit sa hausse et atteint 9,4% en juin, contre 9,1% en mai, une accélération qui reflète principalement la dynamique des prix de l’énergie et de l’alimentation alors que l’inflation sous-jacente se maintient également à un niveau élevé à 5,8%. Dans le même temps, le marché du travail demeure solide, avec un taux de chômage qui se stabilise à 3,8% en moyenne entre mars et mai, tandis que le nombre d’emplois vacants continue d’augmenter. La croissance annuelle des salaires hebdomadaires est élevée mais ne suffit pas à compenser l’accélération des prix. Dans ce contexte, l’érosion du pouvoir d’achat des ménages britanniques se fait ressentir dans les données d’activité puisque les ventes au détail enregistrent un second mois consécutif de recul et s’inscrivent en baisse de 0,1% au mois de juin relativement au mois précédent.
En Zone euro, la BCE a relevé ses taux directeurs pour la première fois depuis 2011, avec une hausse de 50 pb. Alors qu’une hausse de 25 pb était attendue, la BCE a affiché sa détermination à lutter contre l’inflation qui continue d’atteindre des niveaux records. En effet, la croissance des prix à la consommation s’établit à 8,9% en juin en Zone euro, après 8,6% en mai. Afin de limiter les risques de fragmentation de la zone face au durcissement de la politique monétaire, la BCE a dévoilé un nouvel instrument de protection de la transmission, qui prendra la forme d’un programme d’achats d’actifs illimité afin de prévenir l’écartement des taux souverains non justifié par des fondements économiques. Cet instrument a été dévoilé alors que l’Italie fait face à une forte remontée de ses taux souverains, suite au resserrement de la politique monétaire et à la crise politique que traverse le pays. Le Premier Ministre Mario Draghi a en effet présenté sa démission à la suite du boycott d’un vote de confiance au Sénat de trois partis membres de la coalition. Il restera néanmoins en poste jusqu’aux élections législatives, avancées à septembre 2022. Du côté de l’activité économique, le PIB de la Zone euro a progressé de 0,7% au 2ème trimestre par rapport au trimestre précédent. Dans le détail, l’Allemagne a surpris à la hausse avec un PIB stable au 2ème trimestre et une révision à la hausse de la croissance du 1er trimestre. En France, le PIB progresse de 0,5% en rythme trimestriel, tiré par les exportations de services. En Italie et en Espagne, la croissance augmente respectivement de 1,0% et 1,1% par rapport au 1er trimestre. L’activité économique pourrait néanmoins se réduire dans les prochains mois en cas d’arrêt des livraisons de gaz russe. Face à ce risque, les pays membres de l’Union Européenne sont parvenus à un accord sur une réduction volontaire de la demande de gaz cet hiver. La Commission européenne pourrait toutefois imposer une réduction de la consommation de gaz de 15% en cas de grave pénurie
En Chine, la reprise épidémique et la mise en place de confinements stricts sur les derniers mois ont pesé sur l’activité au 2ème trimestre. Le PIB chinois décline de -2,6% en glissement trimestriel, après une hausse de 1,4% enregistrée au 1er trimestre. Néanmoins, les données d’activité suggèrent que le ralentissement économique s’est principalement concentré sur les mois d’avril et mai, avant un redressement en juin du fait de l’amélioration sanitaire. Les ventes au détail ont fortement rebondi en juin à 3,1% en GA, tout comme la production industrielle (+3,9%). Du côté du secteur immobilier, les difficultés se maintiennent avec un fort déclin des investissements (-9,6% en juin en GA). Alors que la politique « zéro covid » continue également de pénaliser l’activité, les dirigeants chinois adoptent désormais un ton plus prudent vis-à-vis de la cible de croissance du PIB de 5,5% en 2022. Au Japon, la Banque du Japon conserve sa politique accommodante en dépit de projections d’inflation revues à la hausse. Les perspectives sur l’inflation (hors alimentaire frais) ont été révisées à 2,3% pour l’année fiscale 2022, soit 0,4 point de pourcentage de plus par rapport aux prévisions du mois d’avril, en lien avec une hausse des prix de l’énergie et de l’alimentation ainsi qu’à la dépréciation du yen. Du côté politique, le parti du Premier Ministre Kishida est sorti vainqueur des élections sénatoriales partielles, ce qui lui permet de conserver sa majorité absolue et, ainsi, ses marges de manœuvres.
Sources des données: Refinitiv, Bloomberg, US Bureau of Labor Statistics, US Bureau of Economic Analysis, Eurostat, BCE, Markit, Statistics Bureau of Japan, Japan Cabinet Office, National Bureau of Statistics of China.
Rédigé par
Eloïse GIRARD-DESBOIS
Analyste économique
Le 2 août 2022